Transgrancanaria Adv. - 2016 - 83 km, 4300 D+
Pourquoi la Transgrancanaria ? L’idée nous a été suggérée par David - un copain qui vit à Gran Canaria - juste après le Restonica Trail. Les traileurs et les sportifs en général le savent bien : à peine un défi est-il réussi qu’on en cherche un autre, un peu plus dur, un peu plus long. Bref, on n’en a jamais assez ! On a besoin de ça pour avancer, pour mieux se connaître, pour être plus fort dans la vie, tout simplement. Je m’égare … Mais il est vrai que le sport de fond apporte une certaine connaissance de soi, on sait ce qu’on vaut et on connaît mieux ses capacités et ses limites.
Il n’a pas fallu longtemps pour que je morde à l’hameçon, embarquant Seb dans l’aventure (qui se remet sérieusement au sport après cinq années d’études d’ostéopathie), ensuite Julie, et puis Stany !
Je n’y avais pas pensé en nous inscrivant, mais un trail début mars implique une préparation hivernale. Autant vous dire que de la boue, on en aura mangé cet hiver ! J’étais allée à Gran Canaria il y a une vingtaine d’années, mais uniquement en touriste classique (pas de trail, pas de rando, juste repos, hôtel et plages, et quelques parcs). L’aridité de l’île m’avait marquée, mais j’étais restée cantonnée à l’extrême sud.
Nous arrivons du mercredi, après un vol de 4 heures 30, quand même. Je n’avais pas réalisé que c’était si loin. On prend possession de notre voiture de location, avec l’aide d’Adriano, un ami avec qui j’ai fait mes études et qui habite désormais sur l’île. Quel plaisir de le revoir en pleine forme ! Il nous accompagne jusqu’à notre appartement à Puerto de Mogan (appart’ qui appartient à la maman de David, vous suivez ? ;-)), une petite station balnéaire très très sympathique, peuplée de … retraités, presqu’exclusivement !
Le jeudi matin, dernier entraînement : 30 min d’endurance fondamentale et 2 séries de 6x30/30, aux sensations, sans se forcer. Seb et moi, en gens du Nord, n’avions pris que du long. Autant vous dire qu’on avait l’air bien avec nos combinaisons polaires, parmi tous ces gens en shorts ! Récupération des dossards le soir (pack coureur bien fourni, la course est chère, mais au vu de tous les cadeaux offerts aux coureurs, je n’ai pas l’impression d’avoir été volée, sans compter les ravitos gargantuesques et la belle veste finisher) et découverte de la dune à Maspalomas avec Adri, où nous croisons toute la team Raidlight ! Une belle brochette de champions, avec Christophe Le Saux, Antoine Guillon, et plein d’autres.
Vendredi, journée de repos avant de partir au combat. Nous nous couchons tôt, car le réveil est à 3 heures, gloups.
Jour J : réveil à 3h, on « empapine » nos pieds de Mytosil, sur les conseils de Pascal, départ à 3h20 pour Meloneras, le lieu de départ, où nous devons prendre la navette. Nous avons préparé nos petits-déjeuners la veille pour manger dans le bus et grappiller quelques minutes de sommeil. Le trajet ne dure qu’une heure trente et nous arrivons avec une heure quart d’avance à Fontanales ! Nous aurions pu gagner au moins une heure de sommeil ! Pourquoi donc faire partir les coureurs à 7 heures alors qu’ils sont là dès 5h45, à faire le pied de grue dans le froid ?? Ce sera le seul petit bémol de l’organisation. Nous prenons donc notre mal en patience, Stany essaie de se remettre du trajet, lui qui est sorti tout blanc et en sueurs du bus.
7h10, le départ est donné, nous démarrons doucement, sur un rythme censé nous permettre d’arriver au bout. Nous prenons rapidement un étroit chemin de terre, qui créera un bouchon. Pas grave, nous avons toute la journée devant nous ! 7 km plus loin, nous dépassons Julie, qui est partie sur les chapeaux de roue ! Ca remonte, on sort les bâtons, et c’est parti. Il pleut, mais là-bas, la pluie n’est pas la même, on pourrait dire que ce sont des gouttelettes bien rafraîchissantes. Et puis, cela ne dure pas. La partie nord, jusqu’à l’ascension vers le Roque Nublo, est très verte, d’allure tropicale, et me fait vraiment penser à la Réunion. On y croise plein de senteurs différentes, et d’ailleurs, ça m’énerve de ne pas savoir ce que je sens. Il faut dire que moi et la botanique, ça fait deux. C’est aussi dans cette partie que nous croiserons Anthony, engagé sur le 125, qui nous donnera quelques nouvelles de Quentin et de Pascal. Ca fait plaisir, et nous avons une pensée pour eux. Ce qu’ils font est extrêmement costaud. De plus Pascal est tombé malade la semaine juste avant, pas cool !
Nous poursuivons notre petit bonhomme de chemin, en remontant des concurrents régulièrement. Stany a décidé de rester avec nous les 40 premiers km, et de garder du jus pour dérouler sur la fin. En effet, il faut savoir que 3000 m de D+ sont avalés sur la première moitié du parcours, d’où l’intérêt de ne pas se brûler. A mesure que nous approchons de la démarcation Nord-Sud, le ciel se dégage, et c’est en abordant la montée vers le Roque Nublo que, au détour d’un virage, nous levons la tête et voyons le Teide enneigé. C’est magique. On s’arrête un instant pour graver cette image dans notre mémoire. C’est pour ça qu’on s’entraîne, c’est pour vivre ce genre de moment qu’on fait du trail. Et les photos ne rendent jamais totalement la beauté des paysages que l’on rencontre.
Nous poursuivons notre ascension, il fait chaud, les traileurs sont à la peine, sauf nous ;-) De manière générale, je monte nettement mieux que je descends, c’est bien et dommage à la fois, car c’est dans les descentes que se gagnent de précieuses minutes ! Je vais travailler tout ça avec Coco, il va bien me trouver des exercices à faire !
Nous arrivons au Roque Nublo, la plus grande partie de l’ascension est derrière nous. Nous devons grimper jusqu’au rocher, pour le pointage, et puis redescendre. C’est un paysage particulier, fait d’une roche rougeâtre, vraiment splendide. De plus, nous avons de la chance : la vue est dégagée quand nous y passons. Nous admirons encore le Teide, et puis nous redescendons un peu vers le ravitaillement de Garanon, avant d’attaquer la montée vers le point culminant de l’île. Et c’est là que j’ai un doute, suis-je bien passée au pointage ??? Tant pis, on verra plus loin si je suis disqualifiée ou non … Pas envie de faire demi-tour. Au ravitaillement, je vérifie une fois de plus mes petits pieds (plus question de me faire avoir comme en Corse), je mange des pommes de terre, Seb des pâtes, il faut reconstituer nos réserves de glycogène. Je remets du coca dans ma bouteille (j’aurai couru tout le trail avec une petite bouteille de coca, et cela m’aura fait un bien fou. Il est bien passé. A retenir pour les trails suivants), et c’est parti pour une montée très sèche, une sorte de mur ardennais, mais bien plus longue, vers le point culminant de l’île à 1900 m environ. Nous dépasserons foule de concurrents. Les murs, ça nous connaît ! ;-)
Et c’est là que nous arrivons au 40e km, je m’étais dit que je passerais un coup de fil aux enfants à mi-parcours pour me redonner courage, ce que je fais donc. Je rassure ma maman, parle à Rémi et à Éline, ça me rebooste, et c’est parti. Stany, le chamois de Tertre, nous quitte là et s’envole vers l’arrivée. Le plus dur est derrière nous.
Je dois me reconcentrer, car le fait d’avoir parlé aux enfants m’a quelque peu distraite. Seb me le rappelle, il veille au grain. Le paysage change, cela devient de la roche, pas encore de la caillasse. La descente n’est pas difficile, les paysages traversés sont magnifiques, tantôt un pierrier, tantôt une jolie monotrace en forêt, j’adore. Nous atteignons sans difficulté le ravito de Tunte, à 52 km. Il reste 30 bornes et nous ne nous attardons pas (remplissage coca, vérification des pieds). L’ambiance y est phénoménale, comme partout ailleurs, les jeunes dansent, chantent, les supporters crient « Animo, animo », ça fait chaud au cœur, les Espagnols savent recevoir les traileurs ! Qu’on se le dise !
Nous attaquons l’avant-dernière ascension, il faut la gérer. Nous montons en lacets pas trop pentus, nous nous forçons à courir sur les portions plates. Seb me dit que c’est là que les minutes se gagnent, ok alors ! Et puis vient la descente, facile, pas facile, mais plutôt pas facile. A un moment donné, c’est même une sorte de route en pavés/cailloux, une via romana, que nous empruntons. Nous doublons des traileurs, dont une traileuse en pleurs, c’est vrai que c’est dur mentalement et que ça fait mal physiquement ! J’essaie de garder le rythme, car si je m’arrête, je suis fichue. De toute façon, Seb veille et m’encourage. Des déchets de gels jonchent le sol, j’ose espérer que ce n’est pas fait exprès, mais j’en doute. En tout cas, cela veut dire que beaucoup de traileurs ont souffert dans cette portion et ont eu besoin d’un remontant ! Nous attaquons la dernière partie de la descente, qui alterne poussière et cailloux, ce n’est pas facile, et mon moral commence « tout doucement » à flancher. C’est toujours comme ça en ce qui me concerne, 2-3 heures avant l’arrivée que je sens proche et lointaine à la fois, je cogite et m’agite. Il faudra que je trouve une solution, car ça me gâche un peu ma fin de course. Il doit bien exister des trucs, des sortes de représentations mentales à avoir. J’ai beau essayé de me concentrer sur du positif, ça ne dure pas plus de cinq minutes. Bref, à travailler. Un coureur du 125 nous dépasse en descente, il sautille et ne se freine pas, ce qui le fait moins souffrir des cuisses je suppose. Si je pouvais avoir cette facilité !
Nous arrivons au ravitaillement d’Ayagaures, les bénévoles sont toujours aux petits soins pour nous. On mange, boit, vérification des pieds, et oui, on ne m’y reprendra pas à deux fois ;-), on met la veste (qu’on enlèvera vite un peu plus loin) et la lampe frontale, et c’est parti pour la dernière ascension. Elle est facile, très. Je voudrais que ce soit comme cela jusqu’à l’arrivée, car ça me repose plus qu’une descente sèche … C’en est fini de nos derniers mètres de D+, place à la descente ! Facile, tout d’abord, sur une large piste forestière, on se prend à rêver … Mais ça ne dure pas, flèche à droite, dans un étroit sentier caillouteux qui descend sec, ça fait mal aux pied, cela exige une grande concentration, ce n’est pas gai. Nous arrivons dans une sorte de torrent asséché j’imagine, au milieu de la végétation, et c’est là que vogue la galère pour la majorité des concurrents, mais pas pour nous ! Nous nous forçons à tenir un rythme, la fin est proche. On dépasse, je dis à une fille du 125 qui n’en peut plus de s’accrocher, ce qu’elle fait. J’ai la pression maintenant, elle compte sur moi ! Nous arrivons enfin sur une large piste forestière et je relâche la pression. Je pleure, je dois évacuer le trop-plein de pression et de concentration qu’a exigé cette descente. On repart, j’en ai marre, mais il faut tenir.
Nous qui espérions pouvoir terminer gentiment la course sur cette piste, voilà que le tracé nous ramène dans le lit du torrent asséché, très large et bien aménagé cette fois-ci, il est vrai, mais ça fait mal quand même. Le dernier ravitaillement était annoncé au KM 77,4, mais il arrivera 3 km plus tard, nous le passons en vitesse, moi, la mine défaite. Une bénévole nous indique les escaliers à redescendre pour retourner dans le lit du torrent … Grrrrrrrrrr. La bénévole me voit descendre avec peine les escaliers, les cuisses font mal, la marche du canard commence ... Coin coin. Il ne reste que 3 km, mais que c’est long. Nous nous forçons à courir, le rythme revient sur le dernier km et demi, qu’est-ce qu’un malheureux km et demi après plus de 80 bornes ? Mais rien du tout, pardi ! Alors, mode guerrière activé, et on voit l’arrivée. On reprend notre copine du 125, et on l’amène au bout !
Seb et moi franchissons la ligne d’arrivée main dans la main, c’est chouette de pouvoir partager ça ensemble. Petite photo, cadeau finisher (une belle veste noire sans manches), et on va retrouver Adri pour le féliciter de son 40 réussi et lui dire au revoir. Stany nous rejoint, il a réalisé un beau chrono. On est contents, on est finishers, le trail était magnifique, l’objectif est réussi, et c’est tout ce qui compte.
Nous apprendrons le lendemain que tous les copains dans l’aventure ont franchi la ligne d’arrivée, que du positif.
Le mot de la fin : la Transgrancanaria est vraiment un magnifique trail, les habitants sont super accueillants, l’organisation est parfaite. Je n’ai que du positif à dire. En tout cas, cela donne envie de partir faire des trails sur les îles. Le Blue Trail à Tenerife la prochaine fois, qui sait ?
Résultats :
Transgrancanaria
Fourez Pascal : 24h51
Samain Anthony : 25h23
Dorchy Quentin : 26h26
Transgrancanaria Advanced
Minckwitz Stany : 13h21
Campener Sébastien et Saffre Ann : 14h32
Cornu Julie : 16h56
Transgrancanaria Marathon
Arduini Ardiano : 9h46
Partie remise >> Bovy David ;-)
Il n’a pas fallu longtemps pour que je morde à l’hameçon, embarquant Seb dans l’aventure (qui se remet sérieusement au sport après cinq années d’études d’ostéopathie), ensuite Julie, et puis Stany !
Je n’y avais pas pensé en nous inscrivant, mais un trail début mars implique une préparation hivernale. Autant vous dire que de la boue, on en aura mangé cet hiver ! J’étais allée à Gran Canaria il y a une vingtaine d’années, mais uniquement en touriste classique (pas de trail, pas de rando, juste repos, hôtel et plages, et quelques parcs). L’aridité de l’île m’avait marquée, mais j’étais restée cantonnée à l’extrême sud.
Nous arrivons du mercredi, après un vol de 4 heures 30, quand même. Je n’avais pas réalisé que c’était si loin. On prend possession de notre voiture de location, avec l’aide d’Adriano, un ami avec qui j’ai fait mes études et qui habite désormais sur l’île. Quel plaisir de le revoir en pleine forme ! Il nous accompagne jusqu’à notre appartement à Puerto de Mogan (appart’ qui appartient à la maman de David, vous suivez ? ;-)), une petite station balnéaire très très sympathique, peuplée de … retraités, presqu’exclusivement !
Le jeudi matin, dernier entraînement : 30 min d’endurance fondamentale et 2 séries de 6x30/30, aux sensations, sans se forcer. Seb et moi, en gens du Nord, n’avions pris que du long. Autant vous dire qu’on avait l’air bien avec nos combinaisons polaires, parmi tous ces gens en shorts ! Récupération des dossards le soir (pack coureur bien fourni, la course est chère, mais au vu de tous les cadeaux offerts aux coureurs, je n’ai pas l’impression d’avoir été volée, sans compter les ravitos gargantuesques et la belle veste finisher) et découverte de la dune à Maspalomas avec Adri, où nous croisons toute la team Raidlight ! Une belle brochette de champions, avec Christophe Le Saux, Antoine Guillon, et plein d’autres.
Vendredi, journée de repos avant de partir au combat. Nous nous couchons tôt, car le réveil est à 3 heures, gloups.
Jour J : réveil à 3h, on « empapine » nos pieds de Mytosil, sur les conseils de Pascal, départ à 3h20 pour Meloneras, le lieu de départ, où nous devons prendre la navette. Nous avons préparé nos petits-déjeuners la veille pour manger dans le bus et grappiller quelques minutes de sommeil. Le trajet ne dure qu’une heure trente et nous arrivons avec une heure quart d’avance à Fontanales ! Nous aurions pu gagner au moins une heure de sommeil ! Pourquoi donc faire partir les coureurs à 7 heures alors qu’ils sont là dès 5h45, à faire le pied de grue dans le froid ?? Ce sera le seul petit bémol de l’organisation. Nous prenons donc notre mal en patience, Stany essaie de se remettre du trajet, lui qui est sorti tout blanc et en sueurs du bus.
7h10, le départ est donné, nous démarrons doucement, sur un rythme censé nous permettre d’arriver au bout. Nous prenons rapidement un étroit chemin de terre, qui créera un bouchon. Pas grave, nous avons toute la journée devant nous ! 7 km plus loin, nous dépassons Julie, qui est partie sur les chapeaux de roue ! Ca remonte, on sort les bâtons, et c’est parti. Il pleut, mais là-bas, la pluie n’est pas la même, on pourrait dire que ce sont des gouttelettes bien rafraîchissantes. Et puis, cela ne dure pas. La partie nord, jusqu’à l’ascension vers le Roque Nublo, est très verte, d’allure tropicale, et me fait vraiment penser à la Réunion. On y croise plein de senteurs différentes, et d’ailleurs, ça m’énerve de ne pas savoir ce que je sens. Il faut dire que moi et la botanique, ça fait deux. C’est aussi dans cette partie que nous croiserons Anthony, engagé sur le 125, qui nous donnera quelques nouvelles de Quentin et de Pascal. Ca fait plaisir, et nous avons une pensée pour eux. Ce qu’ils font est extrêmement costaud. De plus Pascal est tombé malade la semaine juste avant, pas cool !
Nous poursuivons notre petit bonhomme de chemin, en remontant des concurrents régulièrement. Stany a décidé de rester avec nous les 40 premiers km, et de garder du jus pour dérouler sur la fin. En effet, il faut savoir que 3000 m de D+ sont avalés sur la première moitié du parcours, d’où l’intérêt de ne pas se brûler. A mesure que nous approchons de la démarcation Nord-Sud, le ciel se dégage, et c’est en abordant la montée vers le Roque Nublo que, au détour d’un virage, nous levons la tête et voyons le Teide enneigé. C’est magique. On s’arrête un instant pour graver cette image dans notre mémoire. C’est pour ça qu’on s’entraîne, c’est pour vivre ce genre de moment qu’on fait du trail. Et les photos ne rendent jamais totalement la beauté des paysages que l’on rencontre.
Nous poursuivons notre ascension, il fait chaud, les traileurs sont à la peine, sauf nous ;-) De manière générale, je monte nettement mieux que je descends, c’est bien et dommage à la fois, car c’est dans les descentes que se gagnent de précieuses minutes ! Je vais travailler tout ça avec Coco, il va bien me trouver des exercices à faire !
Nous arrivons au Roque Nublo, la plus grande partie de l’ascension est derrière nous. Nous devons grimper jusqu’au rocher, pour le pointage, et puis redescendre. C’est un paysage particulier, fait d’une roche rougeâtre, vraiment splendide. De plus, nous avons de la chance : la vue est dégagée quand nous y passons. Nous admirons encore le Teide, et puis nous redescendons un peu vers le ravitaillement de Garanon, avant d’attaquer la montée vers le point culminant de l’île. Et c’est là que j’ai un doute, suis-je bien passée au pointage ??? Tant pis, on verra plus loin si je suis disqualifiée ou non … Pas envie de faire demi-tour. Au ravitaillement, je vérifie une fois de plus mes petits pieds (plus question de me faire avoir comme en Corse), je mange des pommes de terre, Seb des pâtes, il faut reconstituer nos réserves de glycogène. Je remets du coca dans ma bouteille (j’aurai couru tout le trail avec une petite bouteille de coca, et cela m’aura fait un bien fou. Il est bien passé. A retenir pour les trails suivants), et c’est parti pour une montée très sèche, une sorte de mur ardennais, mais bien plus longue, vers le point culminant de l’île à 1900 m environ. Nous dépasserons foule de concurrents. Les murs, ça nous connaît ! ;-)
Et c’est là que nous arrivons au 40e km, je m’étais dit que je passerais un coup de fil aux enfants à mi-parcours pour me redonner courage, ce que je fais donc. Je rassure ma maman, parle à Rémi et à Éline, ça me rebooste, et c’est parti. Stany, le chamois de Tertre, nous quitte là et s’envole vers l’arrivée. Le plus dur est derrière nous.
Je dois me reconcentrer, car le fait d’avoir parlé aux enfants m’a quelque peu distraite. Seb me le rappelle, il veille au grain. Le paysage change, cela devient de la roche, pas encore de la caillasse. La descente n’est pas difficile, les paysages traversés sont magnifiques, tantôt un pierrier, tantôt une jolie monotrace en forêt, j’adore. Nous atteignons sans difficulté le ravito de Tunte, à 52 km. Il reste 30 bornes et nous ne nous attardons pas (remplissage coca, vérification des pieds). L’ambiance y est phénoménale, comme partout ailleurs, les jeunes dansent, chantent, les supporters crient « Animo, animo », ça fait chaud au cœur, les Espagnols savent recevoir les traileurs ! Qu’on se le dise !
Nous attaquons l’avant-dernière ascension, il faut la gérer. Nous montons en lacets pas trop pentus, nous nous forçons à courir sur les portions plates. Seb me dit que c’est là que les minutes se gagnent, ok alors ! Et puis vient la descente, facile, pas facile, mais plutôt pas facile. A un moment donné, c’est même une sorte de route en pavés/cailloux, une via romana, que nous empruntons. Nous doublons des traileurs, dont une traileuse en pleurs, c’est vrai que c’est dur mentalement et que ça fait mal physiquement ! J’essaie de garder le rythme, car si je m’arrête, je suis fichue. De toute façon, Seb veille et m’encourage. Des déchets de gels jonchent le sol, j’ose espérer que ce n’est pas fait exprès, mais j’en doute. En tout cas, cela veut dire que beaucoup de traileurs ont souffert dans cette portion et ont eu besoin d’un remontant ! Nous attaquons la dernière partie de la descente, qui alterne poussière et cailloux, ce n’est pas facile, et mon moral commence « tout doucement » à flancher. C’est toujours comme ça en ce qui me concerne, 2-3 heures avant l’arrivée que je sens proche et lointaine à la fois, je cogite et m’agite. Il faudra que je trouve une solution, car ça me gâche un peu ma fin de course. Il doit bien exister des trucs, des sortes de représentations mentales à avoir. J’ai beau essayé de me concentrer sur du positif, ça ne dure pas plus de cinq minutes. Bref, à travailler. Un coureur du 125 nous dépasse en descente, il sautille et ne se freine pas, ce qui le fait moins souffrir des cuisses je suppose. Si je pouvais avoir cette facilité !
Nous arrivons au ravitaillement d’Ayagaures, les bénévoles sont toujours aux petits soins pour nous. On mange, boit, vérification des pieds, et oui, on ne m’y reprendra pas à deux fois ;-), on met la veste (qu’on enlèvera vite un peu plus loin) et la lampe frontale, et c’est parti pour la dernière ascension. Elle est facile, très. Je voudrais que ce soit comme cela jusqu’à l’arrivée, car ça me repose plus qu’une descente sèche … C’en est fini de nos derniers mètres de D+, place à la descente ! Facile, tout d’abord, sur une large piste forestière, on se prend à rêver … Mais ça ne dure pas, flèche à droite, dans un étroit sentier caillouteux qui descend sec, ça fait mal aux pied, cela exige une grande concentration, ce n’est pas gai. Nous arrivons dans une sorte de torrent asséché j’imagine, au milieu de la végétation, et c’est là que vogue la galère pour la majorité des concurrents, mais pas pour nous ! Nous nous forçons à tenir un rythme, la fin est proche. On dépasse, je dis à une fille du 125 qui n’en peut plus de s’accrocher, ce qu’elle fait. J’ai la pression maintenant, elle compte sur moi ! Nous arrivons enfin sur une large piste forestière et je relâche la pression. Je pleure, je dois évacuer le trop-plein de pression et de concentration qu’a exigé cette descente. On repart, j’en ai marre, mais il faut tenir.
Nous qui espérions pouvoir terminer gentiment la course sur cette piste, voilà que le tracé nous ramène dans le lit du torrent asséché, très large et bien aménagé cette fois-ci, il est vrai, mais ça fait mal quand même. Le dernier ravitaillement était annoncé au KM 77,4, mais il arrivera 3 km plus tard, nous le passons en vitesse, moi, la mine défaite. Une bénévole nous indique les escaliers à redescendre pour retourner dans le lit du torrent … Grrrrrrrrrr. La bénévole me voit descendre avec peine les escaliers, les cuisses font mal, la marche du canard commence ... Coin coin. Il ne reste que 3 km, mais que c’est long. Nous nous forçons à courir, le rythme revient sur le dernier km et demi, qu’est-ce qu’un malheureux km et demi après plus de 80 bornes ? Mais rien du tout, pardi ! Alors, mode guerrière activé, et on voit l’arrivée. On reprend notre copine du 125, et on l’amène au bout !
Seb et moi franchissons la ligne d’arrivée main dans la main, c’est chouette de pouvoir partager ça ensemble. Petite photo, cadeau finisher (une belle veste noire sans manches), et on va retrouver Adri pour le féliciter de son 40 réussi et lui dire au revoir. Stany nous rejoint, il a réalisé un beau chrono. On est contents, on est finishers, le trail était magnifique, l’objectif est réussi, et c’est tout ce qui compte.
Nous apprendrons le lendemain que tous les copains dans l’aventure ont franchi la ligne d’arrivée, que du positif.
Le mot de la fin : la Transgrancanaria est vraiment un magnifique trail, les habitants sont super accueillants, l’organisation est parfaite. Je n’ai que du positif à dire. En tout cas, cela donne envie de partir faire des trails sur les îles. Le Blue Trail à Tenerife la prochaine fois, qui sait ?
Résultats :
Transgrancanaria
Fourez Pascal : 24h51
Samain Anthony : 25h23
Dorchy Quentin : 26h26
Transgrancanaria Advanced
Minckwitz Stany : 13h21
Campener Sébastien et Saffre Ann : 14h32
Cornu Julie : 16h56
Transgrancanaria Marathon
Arduini Ardiano : 9h46
Partie remise >> Bovy David ;-)